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Contributions sur les systèmes d’information et le réseautage dans la Santé.
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Contributions sur les systèmes d’information et le réseautage dans la Santé.
publiées sur
https://www.idee-s.info

8 octobre 2005

Dossier médical: le dessous des cartes (https://www.idee-s.info/14/dossier-medical-le-dessous-des-cartes/)

Cet article est classé dans Analyses, Santé — Auteur/autrice :

En choisissant comme sous-titre celui de l’émission de géographie d’ARTE, suivons l’exemple de Jean-Christophe Victor qui sait nous éclairer sur notre terre pour tenter d’explorer le dossier médical

En choisissant comme sous-titre celui de l’émission de géographie d’ARTE, suivons l’exemple de Jean-Christophe Victor qui sait nous éclairer sur notre terre. Quand on regarde la terre vue du satellite (comme nous l’offre la NASA en quasi temps réel), on voit une boule bleu marbré de nuages. Que fait le géographe ? Par sa description, ses cartes, ses symboles, il nous permet de comprendre ce qui était, est et sera tant dans l’espace que dans le temps.

Dans la géographie de notre pays, où que l’on soit, dans les hôpitaux, les établissements, chez les médecins de ville (spécialiste ou généraliste), il y a des dossiers médicaux. Ils prennent plusieurs formes et visages en utilisant différents supports du type papier (feuille, fiche, classeur, pochette,…) ou informatique. D’emblée, on peut identifier deux grandes catégories : le dossier archive (les traces du passé) et le dossier vivant (celui qui s’enrichit lors de la visite ou lors d’un séjour en clinique et qui fait l’objet de multiples échanges entre les professionnels de santé).
La meilleure illustration du dossier archive est le sous-sol d’un hôpital où sont entreposés les grandes enveloppes (avec numéro et nom) regroupant tous les papiers d’un séjour. Parfois ces documents sont micro-filmés. Pour un patient qui n’aurait visité que son généraliste, il y a une petite enveloppe avec des fiches et des annotations dans un tiroir d’un meuble présent dans le cabinet du praticien. Depuis quelques années, le médecin a un ordinateur qui remplace partiellement ou totalement ces fiches.
En prenant un regard qui tente de capter le dossier vivant et les flux des documents et composants, on voit alors que le dossier lié à un patient est en plusieurs endroits, qu’il y a des objets qui s’échangent (lettre, radio, compte-rendu,…) mais aussi des annotations voir des informations par téléphone ou par électronique (courriel crypté). Quand on est à l’hôpital, il y a ce qui se dit, s’écrit, se transmet dans les staffs, les passations, les réunions brèves dites de transmission.
Par ce bref survol, on voit donc bien que cohabitent deux grands types d’approche du dossier médical, la première qui stocke et la seconde qui suit (vit) l’épisode de santé. Dans cette dernière « géographie », la prise en compte des échanges entre professionnels de santé est constitutive. Mais chacun des professionnels de santé reste responsable (et détenteur) de l’information médicale qu’il a générée.

Comment peut-on selon les deux catégories décrites précédemment situer le projet dossier médical partagé (DMP) et le projet Dossier de Cancérologie Communiquant (DCC) tels qu’on les connait aujourd’hui ?

Actuellement le dossier médical est essentiellement une « base » de mémoire, de repère et de connaissance sur un ou des épisodes des maladies d’une personne. Il garde des traces des relations et des échanges entre les professionnels de santé et des réflexions (analyses, diagnostic, traitements). Donc si on ouvre rapidement une enveloppe, on voit des documents de travail d’un professionnel de santé mais aussi les documents (lettres, mémos) qui tracent les échanges entre les professionnels de santé. Les documents sont rangés dans l’ensemble le plus près des expéditeurs et destinataires. Cela permet en cas de re-lecture ou consultation une « ré-incarnation » de cette information avec les personnes concernées et tout cela peut alors reprendre du sens. Le dossier médical n’est donc pas uniquement un stockage/archivage mais aussi la manifestation d’échanges aussi bien avec le patient qu’avec et entre les professionnels de santé. La matière du support de ces informations est importante à prendre en considération. La perception « cognitive » ne sera pas la même entre des pages, tableaux et fiche de papier réparties sur une table et une liste sur un écran de 40 cm de diagonale.

Dans ce contexte, le DMP est un ensemble qui s’ajoute aux modes de fonctionnement et stockage actuels. Il ne s’agit pas d’un dossier de travail des professionnels mais d’un ensemble d’extraits regroupés chez des hébergeurs « nationaux » (6). Même pour ceux qui travaillent déjà avec des dossiers médicaux informatisés, il leur sera nécessaire de gérer des nouveaux flux de données et de mesurer les impacts au quotidien et à terme. Comment vont s’articuler les données DMP avec celles contenues dans les logiciels professionnels spécifiques ?.

Tel que décrit dans le projet de cahier des charges et selon le contexte actuel des centres de cancérologie, le DCC s’inscrit de façon plus proche dans le quotidien actuel du travail des PS de ces autres ou en relation avec eux. Tant pour les patients que pour les professionnels de santé, les populations et les lieux sont plus délimités. Il est possible que la masse d’informations à traiter lors des (longs) épisodes de la maladie cancéreuse soit mieux organisée et que les échanges et avis autour de celle-ci soient mieux favorisés. En effet, en cancérologie, l’approche collégiale est souvent de pratique et les outils, bien conçus, ne pourraient que faciliter ce travail. Les défis ergonomiques sont toutefois de taille.

Dans les deux cas, le danger qui guette est celui de l’hégémonie technologique de l’hébergement centralisé avec tous les écueils qu’il sous-tend. Ecueils que l’on trouve dans les domaines :

– technologique
– ergonomique
– cognitif
– juridique, éthique
– médico-social
-…

Dans de prochaines contributions, l’exploration « géographique » sera poursuivie tant dans l’hexagone que dans d’autres pays…

[MAJ – Juin 2006] Episode n°2

Cette contribution fait partie de la série : Dossier médical

  1. Dossier médical: le dessous des cartes
  2. Dossier médical: le dessous des cartes (suite)
  3. Au dessus de la carte
  4. Dossier médical : le dessous des cartes (le médicament)

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